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Algérie

Réformes politiques et médias : la vision de Tebboune face aux inquiétudes des partis

Par Mohammed Iouanoughene 28 septembre 2025
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Le président Abdelmadjid Tebboune déplore l’absence de débat autour du projet de loi sur les partis politiques qu’il a soumis à discussion, affirmant qu’il ne souhaite pas faire adopter une loi sur les partis sans la participation des partis eux-mêmes.

Tous les partis contactés par Maghreb Emergent ont confirmé avoir répondu à la correspondance de la Présidence de la République concernant le projet de loi sur les partis ainsi que les autres lois soumises au débat. Le RCD, le FFS et le Parti des Travailleurs ont indiqué avoir envoyé leurs observations sur le projet ainsi que sur d’autres textes, notamment les projets de loi relatifs à la commune et à la wilaya. Maghreb Emergent a également appris que les partis représentés au Parlement ont formé une commission pour préparer leurs propositions, mais cette dernière n’est pas parvenue à une position consensuelle. Les divergences entre partis siégeant au parlement portent surtout sur la question de la limitation des mandats à la direction des partis politiques, à deux seulement.

Un projet de loi jugé liberticide

Hadj Sadok, député du MSP, estime que « la direction d’un parti est le fruit d’une accumulation d’expérience et de militantisme politique, et il n’est pas possible de la limiter à deux mandats ou plus, car cela donnerait à l’administration le pouvoir d’écarter toute direction qui ne suit pas la ligne du pouvoir ». À l’inverse, certains soutiennent la proposition présidentielle de limiter les mandats des responsables de partis, en considérant cependant que cette condition devrait se restreindre à la direction nationale. D’autres partis soutiennent la proposition telle qu’elle se présente, mais la grande majorité, qu’elle soit de l’opposition ou des soutiens du gouvernement, rejette le projet et le considère comme conduisant à la mort de la vie partisane et politique d’une manière générale.

Il convient de rappeler que Soufiane Djilali a appelé à un congrès extraordinaire du parti Jil Jadid en vue de sa démission et de l’élection d’une nouvelle direction. Dans son message aux cadres de son parti, Djilali estime que le pouvoir souhaite des « partis décor », une allusion au projet de loi sur les partis, qui constitue l’une des principales raisons ayant motivé son retrait de la scène politique, selon ce qu’il a confié à ses proches.

Tebboune exprime des regrets

Le Président Abdelmadjid Tebboune a déclaré lors de sa dernière interview télévisée qu’il comptait organiser le dialogue national promis avant la fin de l’année, mais il a lié cette démarche à l’adoption du nouveau projet de loi sur les partis. Il a affirmé : « Je ne peux passer la loi sans impliquer les partis », tout en regrettant que « le projet n’ait été discuté que par deux ou trois partis ». Cela soulève la question du sort du projet : Tebboune y a-t-il renoncé ? Bien qu’il ait évoqué la modification de la loi électorale et assuré que les échéances électorales seront respectées, il n’a donné aucune précision concernant la date ou l’issue de la loi sur les partis.

Il est probable que son adoption durant la présente législature soit désormais exclue, puisqu’il ne reste que quelques mois avant la fin du mandat. De même, l’ouverture de la prochaine législature avec une loi sur les partis paraît difficile. À noter que le projet s’inscrit dans la deuxième série de réformes qui comprennent également les lois sur la commune, la wilaya et les associations, toutes restant gelées au niveau de la Présidence.

Dialogue national reporté

La loi sur les partis n’est pas le seul obstacle au dialogue national. Tebboune a indiqué d’autres facteurs, dont le plus important est le manque de clarté sur la forme du dialogue : sera-t-il institutionnel ou populaire ? Il a déclaré : « Certains préfèrent une gestion directe, d’autres appellent à un système parlementaire, d’autres encore veulent consacrer le système présidentiel, tandis que certains demandent la création d’une instance consultative hors du Parlement ». Il ajoute : « Je ne suis pas contre ces idées, mais à condition qu’elles soient discutées dans le cadre d’un dialogue institutionnel ou populaire », en soulignant que l’Algérie possède une longue expérience dans ce domaine, remontant au débat national lancé par Houari Boumédiène dans les années 1970 autour de la Charte nationale, jusqu’aux conférences des années 1990 et aux séminaires de dialogue des présidences de Zeroual et Bouteflika.

Toutes les phases antérieures de dialogue se sont toutefois terminées par la seule absorption de la colère populaire, sans changement de la situation. Les dernières déclarations de Tebboune montrent que le débat au sommet du pouvoir reste ouvert sur la nature du régime politique. Son affirmation « certains veulent une instance consultative hors du texte constitutionnel » laisse entendre que sortir du cadre constitutionnel n’est plus un tabou, bien que la loi électorale criminalise aujourd’hui toute action politique qui cherche à changer le système en dehors des cadres constitutionnels.

Ouverture du champ médiatique… selon Tebboune

Les propos du président sur une « télévision ouverte » ont suscité la polémique. Un responsable partisan a commenté : « Tebboune veut-il des influenceurs à la place des politiques ? ». Le président explique qu’il ne peut imposer au directeur de la télévision d’inviter des invités qui ne font pas d’audience.

La réaction des partis à cette position a été pratiquement unanime : ils affirment ne pas avoir été invités à la télévision publique depuis des années. Le RCD n’a pas reçu d’invitation depuis deux décennies ou plus, les représentants du MSP n’ont pas été vus depuis la dernière présidentielle, et le Parti des Travailleurs depuis au moins 2019. Pour le RND, notre interlocuteur ne se souvient plus de la dernière invitation du parti, et demande du temps pour interroger ses camarades.

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