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Le procès du général Hassan s’ouvre aujourd’hui à Oran : l’ombre du général Toufik plane

Par Yacine Temlali 26 novembre 2015
Le général Hassan sera jugé par tribunal composé d’un juge civil et de deux assesseurs militaires ayant au moins le grade de général.

 

Selon la presse, les ennuis du général Hassan seraient dus à l’envoi d’une équipe à la frontière algéro-malienne pour contrer une infiltration d’un groupe de terroristes avec un arsenal d’armement. L’équipe a été arrêtée à son retour à un point de contrôle de l’armée. Le général se verrait ainsi reprocher d’avoir omis d’aviser le commandement militaire de l’opération*.

 

Le procès du général Abdelkader Aït-Ouarabi, alias Hassan, ancien chef de lutte antiterroriste au sein du Département du renseignement et de la sécurité (DRS), s’ouvre ce jeudi devant le tribunal militaire d’Oran.

L’accusé est, selon les informations de ses avocats, poursuivi pour « destruction de documents et infraction aux consignes militaires ». Cela constitue un resserrement des chefs d’inculpation à l’encontre du général Hassan qui faisait face initialement, selon les médias, à des chefs d’accusations de constitution de « bande armée », de « fausses déclarations sur le stock d’armes en sa possession », « détention et rétention d’armes de guerre », « rétention d’informations », « mensonge » et « insubordination ».

Limogé début 2014, le général Hassan dirigeait une unité d’élite des services secrets, le Scorat (Service de coordination opérationnelle et de renseignement antiterroriste). C’est cette unité, mise depuis sous la tutelle de l’état-major, qui a mené l’assaut contre les terroristes au complexe gazier de Tiguentourine (In Amenas) en janvier 2013.

Le général Hassan sera jugé par tribunal composé d’un juge civil et de deux assesseurs militaires ayant au moins le grade de général. Le Code de justice militaire stipule les officiers poursuivis doivent être jugés par des militaires ayant au moins le même grade qu’eux.

 

Le précédent du général Beloucif

 

Le procès du général Hassan n’est pas un « précédent » dans l’histoire de l’institution militaire. Le général Mostefa Beloucif, qui a été secrétaire général du ministère de la Défense nationale et chef d’état-major, a été jugé et condamné par le tribunal militaire de Blida en février 1993.

Un procès précédé, lui aussi, de la divulgation, sans précédent dans les annales de la presse, du fameux « rapport des généraux ». Condamné à 20 ans de prison, le général Mostefa Beloucif a été libéré sous la présidence du général Liamine Zeroual.

L’arrestation du général Hassan s’est faite dans un contexte différent mais des articles de presse prenant sa défense la mettent sous le compte des règlements de compte au sein du régime voire de la lutte des clans.

De manière non-officielle et selon les récits publiés dans la presse, les ennuis du général Hassan seraient dus à l’envoi d’une équipe à la frontière algéro-malienne pour contrer une infiltration d’un groupe de terroristes avec un arsenal d’armement.

L’équipe a été arrêtée à son retour à un point de contrôle de l’armée. Le général Hassan se verrait ainsi reprocher d’avoir omis d’aviser le commandement militaire de l’opération.

Cela renvoie au chef d’accusation « infraction aux consignes militaires » que les avocats comptent contester en mettant en exergue le caractère particulier de l’action des services de renseignements. D’où leur forte insistance à vouloir faire témoigner le général de corps d’armée Mohamed Médiene, dit Toufik, ancien chef du DRS et supérieur hiérarchique direct du général Hassan au moment des faits. Les déclarations de l’ancien patron du DRS sur l’opération en question et, peut-être sur les procédures en vigueur pour les opérations secrètes, pourraient être d’un grand secours à l’accusé.

 

Viendra, viendra pas?

 

Le général Toufik n’a pas été entendu durant l’instruction de l’affaire mais, affirme l’un des avocats du général Hassan, Me Mokrane Aït Larbi, cela n’enlève rien à la faculté de la défense à le citer comme témoin.

En réaction à un article publié par El Watan indiquant que la demande de citation du général Toufik risquait d’être sans effet car elle n’a pas été introduite durant l’instruction, Me Aït Larbi a estimé qu’il s’agissait d’une interprétation « erronée ». « L’article 131 du Code de justice militaire ne souffre aucune ambiguïté : «L’inculpé ou son défenseur indique au procureur militaire de la République, huit jours au moins avant l’audience, le nom et l’adresse des témoins qu’il estime nécessaire de faire entendre » », a-t-il indiqué.

Me Mokrane Aït Larbi a également indiqué qu’il avait la possibilité de demander au juge d’instruction de convoquer le général Toufik mais qu’il a choisi, pour l’intérêt de son client, de le citer « directement pour témoigner à l’audience. »

L’avocat a rappelé que selon la loi, « le tribunal ne peut fonder son jugement que sur des preuves qui sont apportées au cours des débats et contradictoirement discutées devant lui ».

La question du témoignage du général Toufik, « admis à la retraite » le 13 septembre dernier après un quart de siècle à la tête des services de renseignements de l’armée algérienne, sera tranchée par le tribunal. Ce dernier devra également décider si le procès sera public, et donc ouvert à la presse, ou non. Deux aspects qui risquent d’être déterminants dans une affaire sortie du labyrinthe particulièrement sinueux du « système » politique algérien.

 

(*) Cet article a été publié initialement par le Huffington Post Algérie.

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