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La situation en Libye perturbe les échanges commerciaux entre Tunis et Tripoli

Par Yacine Temlali 1 février 2015
La Libye n'est plus, pour les Tunisiens, ce qu'elle était : un marché qui absorbe une partie de la main-d'oeuvre au chômage.

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Avant la détérioration de situation politique et sécuritaire en Libye, ce pays représentait issue économique pour nombre de Tunisiens, soit à travers l’activité commerciale, soit grâce aux transferts d’argent faits, depuis la Libye par des milliers de travailleurs au bénéfice de leurs familles.

 

 

Les Tunisiens, déjà frappés depuis quatre années par une profonde crise économique, sont de plus en plus inquiets de la situation en Libye et de ses conséquences sécuritaires, économiques et sociales sur leur pays.

Même si la Tunisie est liée économiquement au capitalisme international et, plus particulièrement avec la France, il n’en demeure pas moins que la Libye est depuis plus de quatre décennies consécutives une issue pour une grande partie des Tunisiens, soit à travers l’activité commerciale entre les deux pays, soit grâce aux transferts d’argent faits, depuis la Libye par des milliers de travailleurs tunisiens au bénéfice de leurs proches restés au pays.

Les responsables libyens membres du Conseil national de transition libyen avaient, dés le déclenchement de l’insurrection populaire dans le pays, promis aux Tunisiens de leur ouvrir les portes de la Libye après la chute du régime du colonel Mouammar Kadhafi pour accueillir des centaines de milliers de travailleurs, tout en accordant des aides matérielles à la Tunisie.

Cette promesse avait poussé de nombreux Tunisiens, y compris des officiels, à soutenir le Conseil en accueillant leurs partisans.

Mais, ces Tunisiens ont vite déchanté et se retrouvent aujourd’hui face à la réalité d’une situation tragique, marquée par le contrôle du pays par des milices armées qui n’ont ni position ni pensée.

Autant que les Libyens, les Tunisiens souffrent des fléaux que constituent ces milices en termes de sécurité et au plan social dont celui relatif aux trafics d’armes à l’intérieur de la Tunisie.

Figurent aussi parmi les conséquences de cette situation, l’alliance de ces milices avec le mouvement tunisien ‘Ansar al-Charia’, classé en Tunisie comme au plan international au nombre des organisations terroristes, par l’enlèvement de diplomates, de journalistes et de simples citoyens tunisiens.

 

Les taxes douanières de la discorde

 

On note aussi le blocage quasi-total des activités commerciales entre les deux pays à la suite d’une décision unilatérale de la Libye d’imposer des taxes douanières sur des marchandises transportées de la Libye vers la Tunisie, ce qui n’a jamais été appliqué aux exportateurs légalement constitués.

Cette décision a renforcé la crise économique dans les deux pays, mais touché davantage du la Tunisie, qui a fortement souffert de la situation en Libye d’où partent quotidiennement des milliers de personnes pour se réfugier en Tunisie pour fuir les affrontements armés.

Le conflit armé a en outre bloqué les activités économiques dans plusieurs villages et villes de la Libye, entraînant le blocage des affaires et du commerce du coté tunisien, surtout si on prend en compte que Tripoli importait une grande part des produits tunisiens, tout en fournissant à la Tunisie plus de 25% de ses besoins en hydrocarbures à des prix préférentiels, subitement supprimés pour les vendre à Tunis aux mêmes prix qu’à tous les autres pays.

La situation qui prévaut actuellement en Libye a aussi directement influencé le fonctionnement de centaines d’entreprises tunisiennes et entraîné la fermeture de ports du pays, mettant fin presque totalement aux échanges officiels, pour ouvrir la voie aux trafics liés, sans aucun doute, au terrorisme.

Un rapport du ministère tunisien du Commerce a fait état de la régression de 75% des échanges commerciaux bilatéraux à cause de l’arrêt complet des activités de plus de 100 entreprises tunisiennes qui travaillaient uniquement avec le marché libyen.

Le secteur des transports a aussi subi les conséquences de cette situation, notamment la compagnie aérienne tunisienne qui assurait cinq dessertes quotidiennes de la Libye, son premier marché sur le plan des revenus financiers et le deuxième en ce qui concerne le nombre de voyageurs.

 

Des centaines de milliers de réfugiés libyens en Tunisie

 

Selon l’économiste tunisien, Maaz Jouidi, les capacités de production en Tunisie ne sont plus comme elles étaient avant 2011, alors que la création de richesses n’a plus le même rythme, ce qui a fortement détérioré les rapports entre la demande et l’offre, également déséquilibrés par la présence subite de centaines de milliers de Libyens en Tunisie avec pour conséquence la hausse des prix et l’inflation dans le pays.

Seulement, a-t-il ajouté, on note des points positifs, notamment dans les secteurs touristique et hôtelier, ainsi que pour les activités bancaires, grâce aux changes monétaires dans le circuit officiel.

En plus de l’influence négative enregistrée dans les échanges bilatéraux entre les deux pays, la situation en Libye a aussi touché les rapports commerciaux entre la Tunisie et l’Egypte dont 70% du volume passait par la Libye, par la voie terrestre.

Mais, en définitive, le peuple libyen est la première victime de cette situation, vivant quotidiennement des difficultés liées à l’absence cruelle de ses besoins vitaux, à cause de l’accaparement des fondamentaux de l’Etat par les milices et d’une minorité des politiciens, soulignent les observateurs.

 

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