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Internationale

La Grùce ne sortira pas de l’Euro, Tsipras plie mais ne rompt pas

Alexis Tsipras a fait plus de concessions que ce qui était prévu.

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GrĂšce Tsipras

 

La crise grecque a Ă©tĂ© mise en scĂšne de maniĂšre spectaculaire. Un compromis obtenu Ă  l’ultime minute a permis d’éviter une sortie de la GrĂšce de l’euro. Mais dĂšs le dĂ©part, et Ă  moins d’une dĂ©faillance grave de la part de la GrĂšce, cette hypothĂšse Ă©tait exclue.

Le suspens a Ă©tĂ© entretenu jusqu’au bout. Le Grexit a Ă©tĂ© Ă©vitĂ© grĂące Ă  un accord conclu lundi 13 juillet Ă  l’aube, au terme d’un marathon diplomatique organisĂ© de maniĂšre hollywoodienne. La mĂ©chante Angela Merkel qui menaçait d’exclure le beau et jeune Alexis Tsipras a Ă©tĂ© contrainte de cĂ©der, offrant Ă  l’Europe un happy-end dont le grand gagnant sera le second rĂŽle François Hollande. L’histoire a captivĂ© un public trĂšs nombreux, avec des EuropĂ©ens mobilisĂ©s Ă  coups de sondages pour ou contre la sortie de la GrĂšce de l’euro, ainsi qu’une opinion mondiale sĂ©rieusement remontĂ©e contre un jusqu’au-boutiste grec dont l’intransigeance risquait de provoquer une crise Ă©conomie planĂ©taire. Le risque Ă©tait d’autant plus grand que le sort de la petite GrĂšce se jouait parallĂšlement Ă  la crise qui frappe les bourses chinoises.

Pourtant, dĂšs le dĂ©part, une sortie de la GrĂšce de l’euro Ă©tait exclue. L’Europe, montage continental le plus abouti depuis la seconde guerre mondiale, ne pouvait prendre un tel risque, d’autant plus que le sauvetage de la GrĂšce est un « épiphĂ©nomĂšne », selon la formule de l’économiste en chef du Fonds monĂ©taire international (FMI), Olivier Blanchard. Une bonne phrase qui a permis de ramener la crise grecque Ă  sa vĂ©ritable dimension, et de montrer qu’à cette Ă©chelle, l’effort financier Ă  consentir pouvait aisĂ©ment ĂȘtre supportĂ© par l’Europe.

Lourde responsabilité allemande

Dans le mĂȘme temps, les analyses pleuvaient : une sortie de la GrĂšce de l’euro coĂ»terait, sur le plan financier, plus que son sauvetage. Sur le plan politique, ce serait un cataclysme. DĂ©jĂ  contestĂ©e, l’Europe en construction, financiĂšre et technocratique, ne fait plus rĂȘver. Si elle ne prend pas un virage dĂ©mocratique et solidaire, elle risque d’ĂȘtre dĂ©finitivement rejetĂ©e. Comment en exclure la GrĂšce qui symbolisait, prĂ©cisĂ©ment, l’émergence de la volontĂ© populaire dans la construction europĂ©enne.

Autre Ă©lĂ©ment qui montrait clairement qu’un Grexit Ă©tait Ă  Ă©carter : qui pouvait en prendre la responsabilité ? Qui pouvait, dans son pays, assumer un tel Ă©chec ? Angela Merkel, aussi inflexible et intransigeante qu’elle fĂ»t, ne peut pas assumer une telle dĂ©cision. L’Europe a Ă©tĂ© en partie conçue pour permettre aux EuropĂ©ens de vivre en paix avec l’Allemagne. Le poids du passĂ© est si pesant que Berlin ne pouvait s’aventurer sur de tels sentiers.

Les enjeux de ces journĂ©es, qu’on voulait hitchcockiennes, Ă©taient ailleurs. Quatre mĂ©ritent d’ĂȘtre soulignĂ©s. D’abord, l’Europe voilait Ă©viter que l’expĂ©rience grecque ne constitue un fĂącheux prĂ©cĂ©dent. D’autres pays, en difficultĂ©, seraient en effet tentĂ©s de surfer sur la vague Syriza. La percĂ©e de Podemos en Espagne Ă©tait mĂȘme considĂ©rĂ©e comme la menace la plus imminente. Il fallait Ă©touffer le feu qui couvait.

PrimautĂ© de l’Europe financiĂšre

Ensuite, l’Europe financiĂšre voulait montrer clairement qu’elle imposerait ses rĂšgles. Il Ă©tait hors de question de permettre une rĂ©surgence de la rue dans les couloirs feutrĂ©s de Bruxelles et des grandes places boursiĂšres qui marquent la cadence. Le premier ministre britannique David Cameron s’est lancĂ© dans un rĂ©fĂ©rendum sur l’Europe. La City risquait de s’offusquer de la prĂ©sence encombrante de Syriza, et amener le pays Ă  tourner le dos Ă  l’Europe. Shocking !

Autre enjeu, l’Europe voulait montrer que si la GrĂšce n’a pas Ă©tĂ© exclue, il s’en est fallu de peu, de trĂšs peu. D’un cheveu. Et l’Europe n’a acceptĂ© le compromis que parce le quatriĂšme enjeu a Ă©tĂ© atteint : Alexis Tsipras a cĂ©dĂ© sur toute la ligne. Il a fait plus de concessions que ce qui Ă©tait prĂ©vu. Le petit prĂ©tentieux a Ă©tĂ© Ă©crasĂ©, et la puissance financiĂšre l’a laminĂ©. Ce qui est faux, mais cela permet d’entretenir le montage europĂ©en, qui a permis au continent le plus violent de la premiĂšre moitiĂ© du 20Ăšme siĂšcle de devenir le plus apaisĂ© de la seconde moitiĂ© du mĂȘme siĂšcle.

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