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Ihsane El Kadi raconte les conditions de sa détention (communiqué)

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J’ai Ă©tĂ© arrĂȘtĂ© le jeudi 10 juin Ă  17 h 45 en bas du siĂšge de notre agence Ă  la place Audin et conduit dans un fourgon banalisĂ© Ă  la caserne Antar de la DGSI Ă  Hydra. J’ai eu, en arrivant, un long Ă©change intellectuel avec le colonel qui a suivi mon dossier consistant Ă  savoir si l’AlgĂ©rie Ă©tait mure ou pas encore pour la dĂ©mocratie.

Un interrogatoire formel a ensuite dĂ©butĂ© Ă  22 heures passĂ©es avec d’autres officiers, pour rapidement buter sur mon refus de rĂ©pondre Ă  quoi que ce soit tant que je ne savais pas pourquoi j’étais interpellĂ©.

Ce refus s’appuyait Ă©galement sur le fait que j’avais dĂ©jĂ  sĂ©journĂ© pendant 6 heures au mĂȘme endroit et selon le mĂȘme procĂ©dĂ© de l’interpellation dans la rue, le jeudi 18 juin 2020 Ă  partir de 18 H.

J’avais dĂ©jĂ  en cette circonstance refusĂ© le jeu des questions rĂ©ponses invasif et refusĂ© de signer le procĂšs-verbal. Mon statut mal dĂ©fini a alors changĂ© ce jeudi Ă  22 h 30. On m’a retirĂ© mes objets personnels, hormis mon tĂ©lĂ©phone, gardĂ© jusqu’alors Ă©teint sur moi.

L’interrogatoire s’est interrompu Ă  2 heures du matin pour reprendre vendredi en milieu de matinĂ©e, puis se poursuivre en deux sĂ©quences l’aprĂšs-midi. 

J’ai rĂ©pondu durant mon interrogatoire Ă  des questions portant sur le financement d’opĂ©rations prĂ©cises : le prix Ali Bey Boudoukha par le recours au Crowdfunding sur la plate- forme Kisskiss bank bank pour rĂ©compenser le meilleur article d’investigation (organisĂ© en 2014, 2017 et 2019 par Maghreb Emergent) ; la formation en 2015 de journalistes de Radio M dans le cadre du projet Ibtycar de CFI, au mĂȘme titre que d’autres mĂ©dias algĂ©riens dont des mĂ©dias publics.

J’ai Ă©galement dĂ» refuser de rĂ©pondre Ă  une question sur l’origine du texte de la pĂ©tition publiĂ©e, le jeudi 10 juin, sur le site de Radio M dĂ©nonçant « le fait accompli » des Ă©lections lĂ©gislatives sous Ă©tat de siĂšge non dĂ©clarĂ© comme un fait aggravant la crise politique.

J’ai appris par mon fils, le vendredi en mi-journĂ©e, que Khaled Drareni Ă©tait Ă©galement dĂ©tenu Ă  Antar et que la famille de Karim Tabou Ă©tait sans nouvelles de lui. 

J’ai quittĂ© la caserne de Antar Ă  minuit passĂ©e sans savoir trĂšs bien pourquoi j’ai Ă©tĂ© dĂ©tenu pendant 30 heures, et si des suites judiciaires sont prĂ©vues.

Ce sentiment, mĂȘme tempĂ©rĂ© par le traitement plein d’égards de mes « hĂŽtes », m’indigne au plus haut point. Je suis dĂ©jĂ  sous contrĂŽle judiciaire suite Ă  une plainte du ministre de la communication Amar Belhimer pour le contenu d’un article d’analyse politique, une premiĂšre dans l’histoire du pays aprĂšs le 05 octobre.

Le journalisme, l’édition de presse Ă©lectronique et l’expression des opinions ne sont pas un crime.  Ce sont des libertĂ©s garanties par la constitution algĂ©rienne, mĂȘme celle de Abdelmadjid Tebboune.

L’acharnement sĂ©curitaire et judiciaire que je subis depuis un an dans la continuitĂ© de l’emprisonnement de Khaled Drareni et de la censure de nos deux sites d’information doit cesser. Il ne peut pas empĂȘcher la pratique du journalisme indĂ©pendant et de la libre citoyennetĂ©. Et il ne l’empĂȘchera pas. InstituĂ© en mode de gouvernement, il porte un grand prĂ©judice Ă  l’image de l’AlgĂ©rie.

J’exprime aujourd’hui mes plus vifs remerciements Ă  tous ceux et celles qui ont animĂ© et contribuĂ© Ă  ce grand Ă©lan d’indignation et de solidaritĂ© avec moi et mes co-interpellĂ©s et avec nos mĂ©dias