Sur les neuf premiers mois de 2025, les demandes de visas français déposées en Algérie se sont contractées de 24 % par rapport à la même période de 2024, entraînant une baisse de 14,5 % des visas effectivement délivrés. Le taux de refus atteint désormais 31 % pour les demandeurs algériens, un niveau particulièrement élevé au regard des standards observés dans de nombreux consulats.
La ventilation par catégories met en lumière l’ampleur du recul et l’étendue des cercles sociaux touchés. Les visas touristiques reculent de 21 %, signe d’un affaissement de la mobilité dite « ordinaire » et d’un attrait en berne pour la destination France. Les visas économiques cèdent 12,6 %, au détriment des échanges d’affaires, des missions commerciales et des réseaux professionnels transméditerranéens.
Une rigueur consulaire à géométrie variable
Les visites familiales diminuent de 7,4 %, affectant directement les liens tissés entre les diasporas et leurs proches. Le choc le plus spectaculaire concerne toutefois les visas humanitaires, en chute de 48 %, indicateur d’une prudence accrue des services consulaires sur les dossiers jugés sensibles.
Au-delà de la dimension politique, cette rigueur apparaît sélective. Les catégories les plus « productives » pour l’économie française, comme certains déplacements d’affaires ou les études supérieures, sont davantage préservées, tandis que la mobilité de loisirs, familiale ou humanitaire encaisse l’essentiel du choc social.
Capago et la fabrique des obstacles administratifs
L’arrivée de Capago comme nouveau prestataire de collecte des dossiers, en février, a agi comme un multiplicateur d’obstacles. La transition a été marquée par une saturation des plateformes de prise de rendez-vous, des délais allongés et l’apparition de pratiques opportunistes autour de la réservation de créneaux, transformant l’accès à une simple première demande en véritable parcours du combattant.
Pour la rentrée 2025, l’ambassade de France en Algérie revendique ainsi 8 351 visas de long séjour « études », soit plus de 1 000 de plus qu’un an auparavant, avec un taux d’acceptation nettement supérieur à celui des autres catégories. Cette exception a alimenté un débat animé à l’Assemblée nationale française, où plusieurs députés de droite dénoncent une politique jugée trop favorable aux étudiants étrangers.
Au final, la stratégie française s’apparente à une « attractivité sélective ». Le robinet se ferme pour la mobilité de loisirs, familiale ou professionnelle jugée non prioritaire, tandis qu’une voie étroite demeure ouverte pour une élite académique triée sur le volet, appelée à servir à la fois le rayonnement de l’enseignement supérieur français et les besoins de réindustrialisation de l’Hexagone.