Selon le World Inequality Report (WIR) 2026, environ un pour cent du PIB mondial circule chaque année du Sud global vers les pays riches sous la forme de revenus nets sur actifs étrangers. Ces flux, qui incluent le paiement d’intérêts, de dividendes ou de profits rapatriés, excèdent largement l’aide publique au développement reçue par ces mêmes pays.
Ces chiffres bousculent une nouvelle fois le récit dominant des relations Nord-Sud. Celui qui décrit des économies avancées jouant le rôle de donateurs indispensables au développement, alors que les statistiques d’aide publique masquent une réalité financière d’une ampleur et d’une injustice stupéfiantes. Le rapport met en lumière un flux financier « discret mais massif » et montre que l’aide publique n’est qu’une illusion comptable : les transferts privés nets vers le Nord représentent un montant trois fois supérieur à l’aide que le Sud reçoit.
Le rapport ne se contente pas de mesurer les inégalités de patrimoine ; il révèle un mécanisme d’extraction structurelle qui renverse totalement le sens apparent des transferts de richesse. Loin d’être secouru, le Sud apparaît comme le financier net du Nord — un fait économique lourd de conséquences pour l’avenir des nations en développement. L’analyse montre comment un « exorbitant privilège » transforme dettes et réserves en rente au profit des économies les plus riches, annulant de fait les efforts de solidarité et perpétuant une forme modernisée d’échange inégal.
Asymétrie totale
Ce phénomène repose sur l’« exorbitant privilège » des puissances financières comme les États-Unis, l’Europe et le Japon. L’asymétrie est totale : alors que ces économies empruntent sur les marchés à des taux extrêmement faibles, elles placent leurs actifs à des rendements élevés, souvent au Sud. À l’inverse, les pays du Sud doivent supporter des taux d’emprunt bien plus onéreux tout en obtenant des rendements modestes sur leurs propres réserves. Souvent investies dans des actifs « sûrs » comme les bons du Trésor américain, ces réserves génèrent des revenus limités, transformant de fait les pays du Sud en fournisseurs nets de capital pour le Nord. La mécanique est si puissante qu’elle se traduit, pour certains pays à faible revenu, par des sorties nettes atteignant 2 à 3 % du PIB par an — plus que les budgets nationaux consacrés à la santé ou à l’éducation.
Cette dynamique, loin d’être nouvelle, trouve ses racines dans une histoire longue d’asymétrie économique que les travaux de Samir Amin avaient déjà mise en évidence dès le milieu du XXe siècle. Le WIR 2026 en apporte une validation chiffrée contemporaine, qualifiant ce phénomène de « forme moderne d’échange inégal ». Le rapport précise que la domination ne passe plus « par les cargaisons de coton ou de café, mais par les bilans comptables et les marchés obligataires ».
Ce déséquilibre permanent ampute considérablement les budgets des États du Sud, réduit leur capacité à investir dans l’éducation et les infrastructures, aggrave les inégalités internes et renforce leur dépendance structurelle. Les auteurs du rapport insistent sur le fait que « ces écarts ne sont pas inévitables. Ils sont le résultat de choix politiques et institutionnels », plaçant ainsi la bataille pour le développement non pas « dans les champs ou les usines, mais dans les arcanes du système financier international ».
Réorienter les réserves de change du Sud vers… le Sud ?
Face à ce constat, le WIR 2026 et les experts appellent à une réforme profonde pour mettre fin à cette rente financière structurelle. Une première piste concerne les institutions : une révision des règles de Bâle III est jugée essentielle pour réduire la prime de risque abusivement élevée imposée aux pays en développement. Une deuxième consiste à repenser l’utilisation stratégique des vastes réserves de change détenues par le Sud. Ces capitaux, aujourd’hui investis à faible rendement dans le Nord, pourraient être réorientés vers des investissements productifs régionaux au sein même du Sud global. Enfin, pour atténuer immédiatement les effets de ces transferts massifs et redonner une marge de manœuvre budgétaire aux États les plus contraints, l’idée d’un fonds mondial de compensation est avancée.
Au-delà, le rapport insiste sur la nécessité d’une plus grande transparence des revenus d’actifs et d’une taxation plus coordonnée des patrimoines les plus élevés. Car si le top 10 % de la population mondiale possède 75 % de la richesse mondiale, la solution exige à la fois une ingénierie financière et une volonté politique. L’enjeu n’est pas d’augmenter l’aide : il est de corriger un système qui oriente structurellement les revenus financiers vers les économies les plus riches
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WIR 2026 : comment le Sud global transfère chaque année des milliards vers le Nord
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Tikjda relance le tourisme de montagne : un nouveau souffle pour le Djurdjura
À Tikjda, au cœur du Djurdjura, l’hiver ne se limite plus à la neige et au silence des forêts. Cette semaine, la station climatique de Bouira accueille le 1er Festival national hivernal de tourisme, de sport de montagne et de sensibilisation environnementale, un rendez-vous qui marque une véritable dynamique pour un secteur longtemps sous-exploité malgré un potentiel immense.
Du 10 au 13 décembre, plus de 150 participants venus de sept wilayas — d’Alger à Tlemcen, en passant par Tizi Ouzou et Béjaïa — convergent vers Tikjda pour célébrer la Journée mondiale de la montagne et raviver l’envie de découvrir le massif du Djurdjura, l’un des plus beaux joyaux naturels du pays.
Un festival qui réveille un secteur endormi
Initiée par la Direction du tourisme de Bouira, en partenariat avec le Parc national du Djurdjura, cette première édition s’inscrit dans la célébration du centenaire de l’alpinisme en Algérie. L’ambition est claire : revaloriser le tourisme de montagne et mettre en avant des richesses naturelles souvent oubliées dans les stratégies de développement.
Depuis quelques années, les randonnées et sorties en altitude connaissent un regain d’intérêt chez les Algériens comme chez les visiteurs étrangers. Chaque week-end, les hauteurs du Djurdjura attirent des centaines de marcheurs, familles et sportifs. Mais cette affluence souffre encore d’un manque criant de coordination : parkings saturés, embouteillages, randonneurs égarés. Plusieurs interventions de la Protection civile ont été nécessaires pour secourir des groupes coincés dans le brouillard ou surpris par la nuit.
Des activités pour structurer un tourisme durable
Au programme : expositions, formations au secourisme, ateliers dédiés aux sports de montagne, campagnes de nettoyage, conférences sur la biodiversité du parc et randonnées encadrées. L’objectif est simple : professionnaliser la pratique, créer des réflexes de sécurité et sensibiliser les visiteurs à la fragilité des écosystèmes.
Cette dynamique pourrait devenir un modèle. Si l’Algérie veut réellement faire du tourisme de montagne un levier économique, à l’image du Maroc, de la Turquie ou de l’Autriche, elle devra multiplier ce type d’initiatives, structurer les circuits, développer les capacités d’hébergement et accompagner la professionnalisation des guides locaux.
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Tizi Ouzou : 35 000 foyers privés d’électricité, les stations de dessalement menacées
Un chiffre glaçant, révélé fin novembre lors de la visite du ministre de l’Énergie Mourad Adjal, expose l’ampleur de la crise énergétique qui étrangle la wilaya de Tizi Ouzou. Sofian Baha, président de la commission Énergie à l’APW, ne mâche pas ses mots : « Plus de 35 000 foyers ne sont pas raccordés au réseau électrique. La situation est dramatique, notamment dans les communes les plus déficitaires. »
Le choc du ministre, des promesses sans calendrier
Lors de sa rencontre avec les autorités locales, Mourad Adjal s’est dit « surpris » par ce bilan, selon Baha. Il a annoncé une « enveloppe financière supplémentaire conséquente » dédiée à l’électrification rurale afin de soulager ces 35 000 foyers, ainsi que 11 000 autres toujours privés de gaz. Le ministre a également donné instruction d’accélérer les dossiers en souffrance, de déplacer certaines lignes bloquant des investissements et d’ouvrir de nouvelles agences dans les daïras sous-desservies.
Mais aucune donnée chiffrée précise ni aucun calendrier concret n’ont été communiqués. Baha tempère : « Le ministre a promis une réponse dans une semaine au wali, mais à ce stade, rien d’officiel. On parle de l’électrification de 15 000 habitants : c’est positif, mais l’urgence concerne surtout les postes sources de Freha 2 — encore en travaux — et de Sidi Naâmane, complètement à l’arrêt. » En l’absence d’engagements formels, les élus restent dubitatifs.
Aredjradj alerte : les stations de dessalement en péril
L’élu APW Hassan Aredjradj a interpellé le ministre sur les réseaux sociaux, soulignant le cœur du problème. Le poste-source d’Arbi, lancé en 2012 puis gelé pendant des années, doit assurer l’alimentation électrique des deux stations de dessalement dites présidentielles : Tamda Ouguemoune et Aït Chafaa (Sidi Khelifa). « Que ferons-nous de ces infrastructures, si longtemps attendues, sans électricité ? » s’interroge-t-il.
Ce poste est également crucial pour le développement des zones d’activités maritimes et pour des secteurs d’habitat rural en forte expansion démographique.
Aredjradj dénonce par ailleurs l’abandon du poste de Sidi Naâmane, « totalement abandonné alors même que son enveloppe budgétaire est disponible ». Il met aussi en cause certaines lignes Sonelgaz traversant des terrains privés, lesquelles déprécient des parcelles déjà rares dans une wilaya à topographie difficile : « Des solutions techniques existent pour éviter ces situations. »
Une crise qui hypothèque l’avenir
Pour Sofian Baha, la pression sur la demande ne cesse de s’intensifier tandis que de nombreuses communes restent asphyxiées. Si Mourad Adjal a visité l’usine ENEL d’Azazga, récemment reprise par Sonelgaz, l’électrification rurale demeure largement lettre morte.
Les 35 000 foyers non raccordés résument l’échec d’une politique énergétique incapable d’accompagner le développement local. Comment envisager le fonctionnement des stations de dessalement, l’implantation industrielle et la construction de logements sans un accès fiable à l’électricité ?
Faute de décisions concrètes et d’échéances claires, l’attente se prolonge — et Tizi Ouzou reste plongée dans le noir.
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L’Algérie invitée à une initiative pour protéger les cétacés en mer d’Alboran
L’Algérie est invitée à participer, aux côtés du Maroc, de l’Espagne et de Gibraltar, à une initiative visant à protéger les cétacés en mer d’Alboran, rapporte le site Nova Ciencia. Le projet, porté par l’Institut espagnol d’océanographie en collaboration avec l’association CIRCE, propose la création d’un sanctuaire international dans cette zone stratégique où se rencontrent l’Atlantique et la Méditerranée. L’étude, publiée dans Aquatic Conservation: Marine and Freshwater Ecosystems, appelle à une coopération transfrontalière entre les pays riverains afin de garantir la réussite du futur Sanctuaire Porte de la Méditerranée.
La mer d’Alboran, qui constitue la partie la plus occidentale de la Méditerranée, abrite l’une des communautés de cétacés les plus diversifiées du bassin, incluant dauphins, cachalots ou encore rorquals. Cette richesse naturelle est menacée par le trafic maritime, la surpêche et diverses formes de pollution. Le sanctuaire vise à coordonner les efforts de conservation pour réduire ces pressions et protéger durablement ces espèces.Pourquoi l’Algérie est concernée
L’invitation faite à l’Algérie s’explique par la logique écologique du projet. Bien que les délimitations de la mer d’Alboran varient selon les études, certaines approches océanographiques incluent la partie occidentale du littoral algérien dans cette zone d’influence. Les eaux algériennes et marocaines situées au sud de la mer d’Alboran restent en outre encore peu étudiées, ce qui constitue une zone d’ombre scientifique. Actualiser les connaissances sur cette portion méridionale est présenté comme essentiel pour mettre en place une stratégie de conservation cohérente à l’échelle du bassin.
Un cadre juridique possible
Le projet pourrait être intégré au réseau des Aires spécialement protégées d’importance méditerranéenne, les SPAMI, régies par la Convention de Barcelone. Ces aires bénéficient d’un suivi scientifique renforcé et permettent une protection coordonnée des habitats marins les plus sensibles de Méditerranée. L’inclusion de la mer d’Alboran dans ce dispositif offrirait un cadre international solide pour assurer la préservation de ses cétacés. Renaud de Stephanis, président de CIRCE, souligne que la réussite du sanctuaire dépendra de la capacité des gouvernements concernés à travailler ensemble et à harmoniser leurs politiques de conservation.
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Fiat s’enracine davantage en Algérie : un partenariat local qui propulse l’intégration au-delà de 30 %
Stellantis El Djazaïr vient de franchir une nouvelle étape stratégique en scellant un partenariat avec IKAM Auto Industrie, l’un des acteurs algériens les plus solides dans le domaine du freinage. Basée à Tizi Ouzou, l’entreprise s’est imposée depuis 2016 comme une référence nationale du « Made in Algérie », avec plusieurs dizaines d’emplois à son actif et des produits certifiés selon les standards internationaux.
Dans le cadre de cet accord, IKAM fournira des plaquettes de frein destinées au réseau après-vente de Fiat, et potentiellement à l’usine de Tafraoui une fois la phase de sélection finalisée. Au-delà du volet industriel, ce rapprochement reflète une dynamique plus large : Fiat cherche clairement à s’ancrer durablement sur le marché algérien tout en préparant une orientation export vers les pays voisins.
L’ambition affichée par Stellantis est explicite : dépasser les 30 % d’intégration locale dès 2026. Ce partenariat en constitue l’un des leviers les plus concrets. Il renforce une chaîne d’approvisionnement locale désormais plus fiable, rapide et compétitive.
Selon les estimations du marché, les produits d’IKAM sont proposés à des prix inférieurs de 30 à 40 % à ceux des pièces importées — un écart significatif dans un contexte marqué par la hausse des coûts logistiques internationaux.
Cette coopération soulève néanmoins une question légitime : Fiat choisit-elle IKAM avant tout pour soutenir l’industrie nationale, ou cet accord répond-il surtout à une logique d’optimisation des coûts face aux importations devenues onéreuses ?
Le positionnement tarifaire d’IKAM apporte quoi qu’il en soit une réponse pragmatique aux contraintes du constructeur, sans compromis sur la qualité ni la disponibilité, grâce à un stock permanent, des délais de livraison courts et un accompagnement technique renforcé.
Avec IKAM, Stellantis consolide un écosystème industriel local plus robuste. Fiat confirme ainsi qu’elle ne se limite plus à l’assemblage en Algérie : elle prépare l’étape suivante, celle de devenir un acteur régional pleinement intégré.
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Course à l’intelligence artificielle : l’Algérie leader du Maghreb
L’Algérie s’impose comme le leader du Maghreb en intelligence artificielle, selon les données du Global AI Index (GAII) publié par l’hebdomadaire britannique The Observer. Ce classement international évalue le niveau d’investissement, d’innovation et de déploiement de l’intelligence artificielle dans 93 pays à travers le monde sur la période 2020–2025.
À l’échelle maghrébine, l’Algérie occupe la première place, devant le Maroc classé deuxième et la Tunisie troisième. Ce positionnement reflète les performances comparées des trois pays dans la structuration de leurs écosystèmes technologiques et dans l’intégration progressive des solutions basées sur l’intelligence artificielle dans les secteurs public et privé.
108 indicateurs pris en compte
Le Global AI Index s’appuie sur une méthodologie rigoureuse fondée sur 108 indicateurs issus de 23 sources de données. Ces sources incluent des rapports officiels, des bases statistiques internationales, des think tanks, des institutions académiques et des entreprises privées du secteur technologique. En effet, les indicateurs mesurent notamment les capacités de calcul de haute performance, les infrastructures numériques, le nombre de start-up spécialisées en intelligence artificielle, le volume de développeurs qualifiés, l’activité en matière de brevets, la disponibilité énergétique, ainsi que les budgets dédiés à la recherche et au développement.
Ces critères sont regroupés au sein de trois piliers principaux : investissement, innovation et mise en œuvre. Ils sont déclinés en sept sous-piliers : talents, infrastructures, environnement opérationnel, recherche, développement, écosystème d’affaires et stratégie gouvernementale. Chaque sous-pilier possède une pondération spécifique permettant de calculer un score global normalisé sur 100 points pour chaque pays.
Classement africain en intelligence artificielle
Sur le continent africain, l’Algérie se classe 4ᵉ, derrière :
- Égypte (47ᵉ mondiale)
- Afrique du Sud (54ᵉ mondiale)
- Ghana (61ᵉ mondiale)
L’Algérie devance le Maroc, classé 5ᵉ en Afrique et 68ᵉ mondial, ainsi que la Tunisie, 11ᵉ africaine et 85ᵉ mondiale. Cette performance confirme la place de l’Algérie parmi les pays africains les plus avancés dans le développement de l’intelligence artificielle, même si l’ensemble du continent reste en retrait dans les volets essentiels comme la recherche, les talents qualifiés, les infrastructures technologiques et l’écosystème entrepreneurial.
Classement mondial de l’intelligence artificielle
À l’échelle planétaire, la course à l’intelligence artificielle demeure dominée par les grandes puissances technologiques. En effet, le top 5 mondial est constitué des États-Unis, de la Chine, de Singapour, du Royaume-Uni et de la Corée du Sud.
Dans ce classement global, l’Algérie occupe la 65ᵉ place, devant le Maroc (68ᵉ) et la Tunisie (85ᵉ), confirmant son rôle de locomotive régionale au Maghreb.
Perspectives régionales
À moyen terme, la poursuite des investissements publics, le renforcement de la formation universitaire et le soutien accru aux start-up technologiques seront essentiels pour consolider la position de leader de l’Algérie en matière d’intelligence artificielle. Le Maroc et la Tunisie devront, de leur côté, accélérer la mise en œuvre de leurs stratégies nationales afin de réduire l’écart régional et renforcer la compétitivité du Maghreb dans l’économie mondiale de l’IA.
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Une flambée sans précédent frappe les rendez-vous de visa Schengen au marché noir à Oran
Le marché noir des rendez-vous de visa Schengen à Oran connaît une nouvelle hausse des prix sans précédent. Le prix d’un premier rendez-vous pour une demande de visa espagnol a atteint environ 15 millions de centimes, tandis que le coût du renouvellement varie entre 9 et 11 millions de centimes, selon la durée du visa obtenu précédemment. Cette situation confirme la poursuite de la spéculation malgré les mesures récemment mises en place.
Cette augmentation va à l’encontre des attentes apparues après la fin des fonctions d’une employée au consulat d’Espagne, événement qui devait entraîner une baisse des prix et freiner l’activité des intermédiaires illégaux. Or, sur le terrain, les tarifs sont repartis à la hausse et ont même dépassé leurs niveaux antérieurs.
Des intermédiaires actifs dans ce secteur affirmaient pourtant, ces dernières semaines, que le prix du premier rendez-vous auprès du consulat d’Espagne avait diminué de 13 à 11 millions de centimes, tandis que celui du renouvellement des visas de courte durée se situait entre 11 et 13 millions de centimes. Les rendez-vous pour les visas de long séjour étaient passés de 5 à 4,5 millions de centimes. Ces chiffres avaient alors été considérés comme un signe d’un début de décrispation de la crise.
Cependant, cette baisse n’a pas duré. Les prix sont rapidement remontés : le premier rendez-vous atteint aujourd’hui un record de 15 millions de centimes, et les renouvellements s’élèvent de nouveau entre 9 et 11 millions de centimes, illustrant le maintien de l’emprise des réseaux de courtage sur l’accès aux rendez-vous.
La crise n’a donc connu aucun véritable changement, malgré l’ensemble des mesures prises. La gratuité des rendez-vous par la voie légale n’a pas empêché l’expansion du marché noir, en raison de la rareté des créneaux officiels et de la complexité des systèmes de réservation en ligne, ce qui pousse de nombreux demandeurs de visa à recourir de nouveau aux intermédiaires spéculateurs.
Visa français : des demandes dont les réponses tardent
Concernant le dépôt des dossiers de demande de visa français via le service Capago, bien que la procédure soit relativement simple sur le site et permette de contourner les intermédiaires, l’obtention d’un rendez-vous reste extrêmement longue : les délais dépassent souvent cinq à huit mois dans de nombreux cas, avec quelques exceptions limitées.
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Le service de la dette étrangle les pays en développement : impacts contrastés au Maghreb (BM)
Un rapport de la Banque mondiale publié le 3 décembre 2025 lance l’alerte: dans de nombreux pays en développement, le remboursement de la dette absorbe plus de ressources que les nouveaux financements reçus. Conséquence : les investissements dans la santé, l’éducation et les infrastructures sont fortement limités. L’Algérie, le Maroc et la Tunisie font face à cette contrainte avec des trajectoires très différentes.
Dette mondiale : des niveaux historiques
En 2024, les sorties nettes de capitaux des pays en développement ont atteint 205,1 milliards de dollars, portant le déficit cumulé 2022‑2024 à 741 milliards de dollars, le niveau le plus élevé depuis cinquante ans.
La dette extérieure totale des pays à revenu faible et intermédiaire s’élève à 8 900 milliards de dollars, tandis que les pays éligibles aux financements concessionnels de l’Association internationale de développement (IDA) cumulent environ 1 200 milliards de dollars.
Parallèlement, le coût des emprunts a atteint des records depuis plus de vingt ans pour les créanciers publics et dix-sept ans pour les privés, mettant les budgets publics sous pression et limitant les investissements dans les secteurs essentiels.Algérie : faible dette extérieure mais…
L’Algérie, qui a traversé dans les années 1980 une grave crise du service de la dette, l’entraînant vers un ajustement structurel sous l’égide du FMI, a depuis opté pour une politique de faible endettement extérieur. Grâce aux recettes pétrolières et à l’autofinancement, sa dette extérieure reste très faible (2,87 milliards de dollars, 1,3 % du PIB) et le service de la dette limité. Cependant, la dépendance à la dette intérieure et au financement non conventionnel (2017‑2019) a accru la masse monétaire, absorbé une grande partie de la liquidité bancaire et limité le financement du secteur privé. La croissance hors hydrocarbures reste insuffisante (4,8 %) pour créer les emplois nécessaires.
Maroc : un accès aux marchés à coût élevéLe Maroc maintient un accès relatif aux marchés internationaux, mais le coût de l’emprunt est historiquement élevé. Sa dette extérieure croît pour financer infrastructures, transition énergétique et programmes sociaux. Le service de la dette absorbe 13 % des recettes d’exportation, réduisant la marge pour les investissements publics. La croissance hors hydrocarbures atteint 3,5 %.
Tunisie : risque d’asphyxie financièreAvec une dette publique de 84,5 % du PIB et un service de la dette mobilisant une grande part des recettes, la Tunisie se trouve dans la situation la plus fragile. L’accès limité aux financements extérieurs et une croissance structurellement faible mettent sous pression les investissements publics et les dépenses sociales, compromettant durablement le développement. La croissance hors hydrocarbures est de 2 %.
Synthèse 2024 – Maghreb
Pays Dette extérieure / publique Service de la dette Croissance hors hydrocarbures Particularités Algérie 2,87 Mds $ (1,3 % PIB) Faible 4,8 % Dépendance à la dette intérieure, financement non conventionnel, héritage de la crise des années 80 Maroc En progression 13 % des recettes d’exportation 3,5 % Coût élevé de l’emprunt limite les investissements Tunisie 84,5 % du PIB Très élevé 2 % Accès limité aux financements externes, risque d’asphyxie financière
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L’Europe et le « grand remplacement » version Trump “l’homme de paix”
Gianni Infantino, président de la Fédération internationale de football (FIFA) a remis, vendredi 5 décembre, à Washington DC, un « prix de la paix » à Donald Trump. Le patron du football mondial en rajoute en flatterie alors que le jour, même, l’administration de cet “homme de paix” a émis un document intitulé « Stratégie de défense nationale – NSS 2025 -» décrivant un monde blanc menacé par l’invasion des non-blancs, principalement venant d’Afrique.
National Security Strategy, NSS 2025, est un document officiel définissant les priorités de sécurité et de politique étrangère des États-Unis pour les années à venir. Il fait de l’Europe un terrain de bataille civilisationnelle, un espace blanc qui serait menacé par les “colored”
Le document américain ne relève pas d’un simple approche géopolitique, il se base sur une lecture civilisationnelle et identitaire de la sécurité. Ainsi, reprenant le discours raciste du “grand remplacement”, le document décrit l’Europe comme une “civilisation” menacée par les migrations et les évolutions démographiques. Le document paraphrase l’expression de grand remplacement en évoquant un”effacement civilisationnel” de l’Europe et même l’avènement d’une majorité « non-européenne » dans certains pays.
Le document indique que les États-Unis veulent soutenir leurs alliés “pour préserver la liberté et la sécurité de l’Europe, tout en restaurant la confiance civilisationnelle de l’Europe et l’identité occidentale ». Cette phrase illustre clairement l’approche civilisationnelle du document, qui ne se limite pas à la défense militaire, mais inclut une dimension identitaire.
Les formules sont volontairement vagues, mais elles reprennent résolument le discours xénophones des extrême-droites européennes qui font des migrants et de la diversité des menaces existentielles. De plus, le document précise que « l’ère de la migration de masse est terminée — le choix de qui un pays laisse entrer sur son territoire… déterminera inévitablement l’avenir de cette nation », soulignant la manière dont l’immigration est construite comme un facteur de menace civilisationnelle.
Le texte ne se limite pas à l’alerte. Le NSS appelle à « cultiver la résistance » en Europe, ce qui est clairement vu comme un encouragement aux partis racistes, de la droite dure à l’extrême droite. The Guardian, y voit « un soutien explicite aux partis d’extrême droite européens » et d’un texte qui «semble adhérer à la théorie du complot raciste du « grand remplacement ».
Les officiels européens, soucieux de ne pas s’aliéner “l’homme de paix” Trump se sont abstenus de commenter, ce sont d’ex-responsables qui ont assumé la réplique. L’ancien Premier ministre suédois Carl Bildt, figure influente de la diplomatie nordique, ancien ministre des Affaires étrangères et promoteur de la construction européenne, connu pour ses positions généralement centristes et atlantistes, donc loin d’être un dangereux gauchiste, n’a pas mâché ses mots. « C’est un langage qu’on ne retrouve généralement que dans les esprits bizarres du Kremlin », a-t-il posté sur X, qualifiant le document de « plus à droite que l’extrême droite en Europe ». Que cette critique vienne d’un dirigeant au profil conservateur renforce le poids de l’alerte.
Un cadrage racialiste et néocolonial
Implicitement, l’Afrique et ses diasporas sont présentées comme sources de menace. Le texte mentionne des populations « non-européennes » de manière générale, ce qui contribue à un cadrage racialiste et néocolonial : les migrations sont perçues comme un facteur de danger civilisationnel plutôt que comme des mouvements humains et socio-économiques complexes. Une lecture essentialiste qui transforme des réalités sociales en risques stratégiques. Et qui pourrait influencer la manière dont les décideurs européens perçoivent et gèrent la diversité et l’intégration.
La NSS 2025 redéfinit ainsi les rapports transatlantiques : les alliances ne sont plus seulement fondées sur des valeurs partagées — démocratie, droits humains, pluralisme — mais sur des critères ethnoculturels implicites. Le texte normalise de fait les discours identitaires et xénophobes et offre un cadre internationalement légitime aux partis populistes européens.
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Procès de Bouakba : le débat sur la mémoire clos en quelques heures
Les sentiments des personnes présentes au procès du journaliste Saad Bouakba, de la chaîne « Vision TV» et de son directeur, étaient partagés hier au tribunal de Bir Mourad Raïs, relevant de la Cour d’Alger.
Entre le soulagement de voir Bouakba quitter la prison, la tristesse suscitée par la fermeture de cette jeune WebTV, et les peines de prison avec sursis prononcées par le tribunal, les journalistes, avocats et politiques restés jusqu’à la fin de l’audience demeuraient perplexes quant à l’avenir de cette profession, devenue le maillon le plus faible de la société, comme si le travail journalistique en lui-même était un crime.
Cette fragilité est apparue de manière frappante lorsque le journaliste Abdelhak Laaleg, animateur de l’émission mise en cause, s’est présenté à la barre.
Le nom d’Abdelhak Laalag figurait dans le dossier comme témoin, mais, au fil des questions du tribunal et des plaidoiries des avocats, son statut a prêté à confusion pour la présidente de l’audience qui, en jetant un regard sur le dossier, s’est rendu compte qu’il n’était pas accusé.
« …Tu es témoin dans le procès-verbal ? » s’étonna la présidente en s’adressant au journaliste d’un ton surpris, après avoir longuement tourné autour sur une seule question : « Pourquoi as-tu utilisé les termes “détournement” et “se sont partagés le gâteau ” dans tes questions, et qu’entendais-tu par là ? »
L’animateur de l’émission télévisée : témoin ou accusé ?
Il vint ensuite le tour des avocats de la partie civile, qui n’ont pas caché leur gêne à plaider contre Saad Bouakba, auteur des chroniques qui ont formé ces avocats étaient durant leur cursus de lycéens et l’universitaires.
La cible facile – comme il est apparu – est donc Abdelhak Laaleg et sa jeune chaîne « Roya », qu’un des avocats a accusée ouvertement de « rechercher le sensationnel au détriment de la dignité des gens ».
À ce moment-là, les choses sont devenues claires : Bouakba allait être libéré, alors que la chaîne « Roya » ne reviendrait pas, malgré l’optimisme de son directeur, Harraoui Abdelhalim, d’autant que, contrairement aux rumeurs, le siège n’a pas été scellé, mais uniquement les studios de la chaine, les gendarmes lui ayant indiqué qu’il s’agissait d’une mesure conservatoire qu’il n’était pas nécessaire de médiatiser.
Même lorsque procureur a requis cinq ans de prison à l’encontre de Bouakba et deux ans contre le directeur de la chaîne), le sentiment dominant dans la salle et dans le hall du tribunal était que Bouakba quitterait bientôt la prison de Koléa, soit immédiatement après la fin du procès, soit une ou deux semaines plus tard en cas de renvoi du prononcé du jugement.
Soulagement et amertume
Un autre épisode de l’audience a mis le journaliste Fodil Boumala, présent dans la salle, en colère : « C’est un scandale moral, comment les avocats de la partie civile peuvent-ils se désister de l’affaire après avoir terminé leurs plaidoiries et demandé un dinar symbolique de dommages et intérêts ? ».
Maître Mustapha Bouchachi répond : « Conclure une plaidoirie en annonçant le désistement de l’action est un beau geste de la part de l’avocat, mais se désister tout en réclamant des dommages et intérêts en même temps n’a aucune logique. ».
Quant à maître Abdellah Heboul, il estime que « nous ne sommes pas devant un litige entre deux parties, ou une affaire de diffamation… nous sommes face à une affaire d’outrage aux symboles de la révolution ; par conséquent, même si la partie civile se désiste, l’action publique, elle, se poursuit. ».
Dans sa plaidoirie, Heboul a soulevé un autre problème procédural qui ramène l’affaire à son point de départ : Bouakba, la chaîne « Roya » et son équipe sont poursuivis sur la base de l’article 148 bis du code pénal, qui prévoit une peine de trois à cinq ans de prison et une amende de 500 000 à 1 000 000 dinars pour toute insulte, injure ou diffamation, par quelque moyen que ce soit, visant les « symboles de la Révolution de libération nationale ». La question qui se pose alors est : qui sont ces « symboles de la Révolution de libération nationale » ?
Un débat évacué
L’expression « symboles de la Révolution de libération » est apparue pour la première fois dans la loi sur le moudjahid et le chahid sous la présidence de feu Chadli Bendjedid, avant d’être modifiée par la loi 99/07 dont l’article 52 énumère ces symboles comme suite : “la déclaration du 1er Novembre, le drapeau national, l’hymne national, le chahid, le moudjahid, la veuve du chahid, les cimetières des martyrs, les musées du moudjahid, les sites et monuments historiques, ainsi que les places comportant des symboles de cette révolution”.
Cependant, la loi sur le moudjahid et le chahid ne prévoit aucune sanction penale pour l’outrage aux symboles de la révolution, et des peines similaires n’avaient jamais été intégrées au code pénal par les précédents présidents.
Heboul souligne que « la question des symboles de la révolution a été élevée au rang constitutionnel depuis la révision de 1996, ce qui signifie que l’article 52 de la loi sur le moudjahid et le chahid est supplanté par la Constitution, qui ne retient que deux symboles : le drapeau et l’hymne nationaux ».
Ce débat juridique a besoin d’être prolongé par une réflexion historique plus approfondie pour éclairer le conflit porté devant la justice entre Mahdia, fille du moudjahid et président Ahmed Ben Bella, et le journaliste Saad Bouakba.
Ce débat aurait dû se prolonger pendant des jours et des semaines dans les médias, à travers des plateaux télévisés et des comptes rendus depuis la salle d’audience.
Mais le tribunal et les avocats de la partie civile ont choisi, dès le début, la voie la plus courte, l’avocat Hafid Tamert ayant déclaré à l’audience que lui et ses confrères avaient demandé à leur cliente de ne pas exercer son droit de réponse garanti par la Constitution.
Un autre avocat est allé jusqu’à proposer à Saad Bouakba de présenter des excuses en contrepartie du désistement de la plainte.
Ben Bella est davantage mon père que le tien
Un avocat de la défense a, de son côté, affirmé que « Bouakba est prêt à dire à Mahdia Ben Bella que, si ses propos ont été compris comme une offense à son père, il s’en excuse ».
L’audience s’est achevée lorsque Bouakba s’est adressé à elle en disant : « Pardonne-moi… je ne peux pas porter atteinte à ton père, Ben Bella est davantage mon père que le tien… l’acquittement ne me suffit pas. »
Bouakba n’a peut-être pas saisi le sens que prenait le procès, lequel s’est terminé par sa condamnation à trois ans de prison avec sursis et par la fermeture d’un média qui signifie la fermeture du débat historique, politique et juridique…