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Maghreb

Risque d’intervention militaire occidentale en Libye: Tunis et Alger se concertent

Par Yazid Ferhat 14 février 2016

Alger et Tunis se concertent sur le dossier libyen alors que le risque d’une intervention occidentale, qu’ils réprouvent sur le fond comme étant contre-productive, se fait de plus en plus sentir.

 

A son arrivée à Alger, samedi 13 février 2016, le ministre tunisien des Affaires étrangères, Khemaies Jhinaoui, n’a cependant pas évoqué directement la question libyenne qui inquiète les deux capitales. C’est a-t-il déclaré, une « visite ordinaire » qui s’inscrit « dans le cadre de la coordination et de la concertation entre les deux pays autour des questions bilatérales ainsi que les questions intéressant la région ».

Le ministre tunisien a indiqué qu’il était porteur d’un message du président tunisien Béji Caïd-Essebsi à son homologue algérien. La Tunisie a exprimé ses inquiétudes à l’égard d’une intervention occidentale et a décidé de prendre des dispositions pour se préparer à ses conséquences.

Le président tunisien a adressé récemment une mise en garde aux Occidentaux, tentés par une intervention militaire en Libye dont les conséquences risquent d’être graves pour les pays de la région.

En 2011, après l’intervention de l’Otan qui a transformé un mandat de protection des civils en opération de destruction du régime de Kadhafi, la Tunisie a du accueillir des centaines de milliers de personnes, libyennes et non-libyennes, qui fuyaient le conflit. Une nouvelle intervention militaire pourrait avoir les mêmes conséquences avec, également, une possibilité de repli des groupes radicaux vers les territoires des pays voisins.

Un remake du désastre de 2011?

Le président Beji Caïd-Essebsi a été particulièrement insistant sur cet aspect dans son adresse aux Occidentaux. « Je dis, et très clairement, aux amis qui pensent à cela (à une intervention, ndlr) de ne pas penser seulement à leurs intérêts. De penser aux intérêts des pays voisins et au premier rang la Tunisie… »Avant tout acte de ce genre, s’il vous plaît, consultez-nous, parce qu’il peut vous servir mais nous porter atteinte » a-t-il ajouté.

L’Algérie, déjà hostile à l’intervention occidentale en Libye en 2011, reste sur la même position. Le gouvernement algérien maintient qu’il faut poursuivre les efforts politiques pour amener les factions libyennes à s’entendre sur la remise sur pied de l’Etat libyen.

La diplomatie algérienne maintient que la solution ne peut être que politique et que le risque posé par Daech – dont l’implantation reste limitée à la région de Syrte et à Derna – ne justifie pas une nouvelle aventure militaire aux conséquences dangereuses.

Au contraire, comme en 2011, une intervention occidentale risque de conforter les plus radicaux et de ruiner les efforts accomplis jusqu’à présent, sous l’égide de l’Onu, pour aller vers une solution politique. Dans un entretien au journal Le Monde, en octobre dernier, Ramtane Lamamra, chef de la diplomatie algérienne avait rappelé les dégâts de l’intervention occidentale en Libye mettant ainsi implicitement garde contre une réédition du même type d’intervention.

« La manière dont la situation a été gérée en Libye [en 2011] par la communauté internationale, dont le régime précédent a été abattu, n’a pas favorisé les efforts de ceux, y compris l’Union africaine, qui s’employaient à promouvoir une transition inclusive et pacifique. »

De son côté, le ministre délégué chargé des Affaires maghrébines et africaines, Abdelkader Messahel a affirmé le 25 janvier, alors que les bruits d’intervention militaire occidentale se faisaient plus fort, a souligné que « l’Algérie poursuivra, en dépit de l’adversité, sa mission qui consiste à accompagner les forces vives libyennes ayant marqué leur disponibilité à œuvrer pour une solution politique”.

« L’impuissance des pays maghrébins »

Hier, le Front des Forces socialistes (FFS) a mis en garde contre les « conséquences graves pour toute la région » qui pourraient être engendrées par une « intervention militaire en Libye ».

Le FFS a déploré « l’impuissance des pays maghrébins face à cette situation » alors que les Occidentaux persistent à poursuivre les « politiques de la guerre, qui loin de lutter efficacement contre le terrorisme aboutissent à la destruction des Etats et à des situations humanitaires catastrophiques. »

La faiblesse politique des Etats de la région face aux menées extérieures est directement liée, selon le FFS, à la panne du projet maghrébin. « Le FFS est convaincu que seule la construction démocratique d’un Grand Maghreb est à même d’apporter à la région et à nos concitoyens la paix, la stabilité et le développement ».

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